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City of Villains – Épisode 1 – Critique du roman Disney

Dans City of Villains, Mary Elizabeth est une lycéenne comme les autres. À un détail près : après les cours, elle est en stage au poste de police central de Monarch City. Entre deux tas de paperasses, elle observe avec envie les agents qui luttent contre la hausse de la criminalité. Depuis des années, les tensions s’accumulent entre l’élite aisée de la ville et les habitants de la Cicatrice, le quartier défavorisé où régnait autrefois la magie. Lorsque la fille de l’un des plus puissants hommes d’affaires de Monarch disparaît, Mary Elizabeth se voit chargée de l’enquête et a enfin l’occasion de faire ses preuves. Mais elle découvre vite que cet enlèvement n’est que le début d’un mystère bien plus épais et sinistre : en s’approchant de la vérité, elle sera prise dans le combat de ceux qui ont autrefois pu manier la magie contre ceux qui seraient prêts à tout pour la retrouver. Quitte à engendrer des monstres…

Les débuts d’une nouvelle saga jeunesse chez Disney

Qu’on se le dise tout de suite, ce premier tome de cette nouvelle saga City of Villains (un effort de traduction en français aurait été le bienvenu), disponible depuis le 26 janvier 2021 aux États-Unis et le 12 mai 2021 en France, avait beaucoup de potentiel mais cet univers a été gâché par une exécution narrative un peu problématique, qui l’empêche clairement de tenir les promesses de son concept de départ. Le roman ne parvient pas à intégrer de manière significative les Méchants Disney tels que nous les connaissons…

City of Villains explore encore d’une autre manière le folklore des méchants les plus célèbres de Disney, bien que la narration s’appuie avant tout sur le protagoniste Mary Elizabeth. C’est dans un récit décrit du point de vue de l’héroïne que nous rencontrons son petit ami James (qui est parfois le capitaine Crochet en raison des liens de sa famille avec la criminalité) et l’équipe de Neverland, qui comprend notamment M. Mouche et Ursula. Nous faisons aussi la connaissance de Mally Saint et, friands des potins du lycée, apprenons qu’il y eu une brouille entre Mally et les fées Flora, Pâquerette et Pimprenelle. Ce livre regorge de références à des personnages Disney. Pour autant, les Méchants Disney ont droit à un traitement différent et ont finalement peu de connexions avec l’univers que nous connaissons. Leurs origines sont retravaillées : le concept est donc sur le papier somme toute intéressant.

Les Méchants Disney traités dans un monde contemporain

Après tout, sans être nécessairement fan du genre de la réinvention des personnages de leurs origines à leur caractère, la saga de téléfilms Descendants sur Disney Channel a prouvé qu’il était possible d’offrir des histoires inédites à ces personnages cultes. En cela, City of Villains réussit son pari. On peut l’applaudir pour réussir à ramener les méchants dans un décor contemporaine, mettant en valeur l’atmosphère potineuse du lycée et la dépendance des adolescents à leurs téléphones portables. Ce discours à la jeunesse d’aujourd’hui pourra peut-être être entendu d’ailleurs.

Quant à se projeter, peut-être que le deuxième volet aura davantage pour missions d’explorer le passé des méchants et qu’il nous amènera vers une histoire un peu plus noire. Car le premier livre manque clairement de saveur : l’idée de transporter les méchants vers des mondes plus proches des nôtes est louable mais cela devrait être fait avec une forme de (fausse) subtilité. Par exemple, l’explication de la manière dont Mally Saint a changé son nom en Maléfique est un poil trop tirée par les cheveux. Le traitement de l’information ou de la surinformation dans le tome 1 de City of Villains provoque finalement une certain frustation au fil de la lecture.

City of Villains captive au départ mais déçoit à l’arrivée

Le texte de présentation et la couverture ont fière allure, sorte de pastiche d’histoire à la DC Comics qui suffit à susciter l’intérêt et à encourager les lecteurs à rapporter ce livre à la maison. La première ligne du livre – « J’ai provoqué la fin du monde » – couplée au souvenir de Mary Elizabeth du décès traumatisant de sa famille accrochera sans nul doute les lecteurs. Les plus jeunes d’entre eux, qui espèrent se trouver une place dans le monde qui les entoure et de tracer leur propre destin personnel, auront sûrement une sorte de connexion avec Mary Elizabeth et ses aspirations

Quant à la manière dont se construit le monde dans ce livre, là encore ce n’est pas forcément excellent. Les lecteurs découvrent l’histoire du conflit entre les différentes factions de Monarch City : les magicalistes, les naturalistes, les Enclavés et les amagicalistes. Les Héritiers descendent de la magie et s’opposent souvent aux membres de l’Enclave, décrits comme des hommes d’affaires sans magie des quartiers chics des Enclavés qui prennent le contrôle du quartier de Cicatrice lentement… Il existe également des points de repère clés qui rappellent l’esthétique des films Disney – Wonderland en est un excellent exemple, ce qui fait que les fans de Disney peuvent se retrouver ici et là. Entre des événements comme la Chute de la baguette et le mortel Lac Miracle, la Cicatrice n’est pas sans ses hauts et ses bas historiques, combinant intelligemment non seulement une partie de la mythologie de Disney, mais aussi des mondes, des décors et des influences alternatives. Tous ces lieux fictifs ancrés dans une forme de réel manquent malgré tout de description, si bien qu’il est difficile de se le recréer de manière un tant soit peu détaillée dans son esprit. L’abstraction est souvent de mise…

Une construction narrative trop peu soignée

Nous resterons également mitigés sur le but alloué à l’héroïne. Elle qui n’a que 17 ans, est encore au lycée et a peu d’expérience devient une modeste stagiaire pour la police. Il semblerait alors improbable qu’elle se voit attribuer une affaire délicate comme une disparition. Et c’est pourtant le cas ! Nous avons laissé à l’histoire le bénéfice du doute. Mary Elizabeth est Héritière, ce qui lui permet de travailler plus facilement dans la Cicatrice, et les tensions entre les Héritiers et les non-Héritiers laissent entendre que l’application de la loi peut être fragile. Cependant, l’héroïne ne montre pas de capacités remarquables qui la qualifient pour ce stage ou une carrière dans ce domaine. Le fait même de confier une telle mission d’enquête à une jeune de 17 ans implique des responsabilités hors-normes. Sans divulgâcher trop l’intrigue, un autre aspect de l’histoire semble incohérent, celui de nous plonger dans un monde se voulant plus réel. L’homme riche avec l’enfant disparu ne fait appel à un avocat. Que votre histoire se déroule dans un monde magique ou non, l’une des principales étapes d’une enquête consiste à établir l’alibi de chaque personne suspecte lorsque vous l’interrogez, ce qui est souvent négligé par tous les détectives. D’autres erreurs procédurales sont difficilement dures à avaler comme le partenaire de Mary Elizabeth qui retire son arme et la laisse dehors, avant qu’ils aillent interroger le parent de la fille disparue. Qui dit enfin monde réel (avec des téléphones portables, rappelons-le) dit histoire contemporaine ! Mais voilà, l’enquête qui nous est présentée est clairement bâclée : pas de recherche de preuves physiques, pas de collecte d’ADN de la victime à des fins de comparaison, pas de sécurisation des scènes de crime potentielles… Difficilement acceptable quand on veut proposer un polar jeunesse !

Le potentiel gâché de City of Villains

Enfin, le rythme de City of Villains permet une lecture légère mais captivante, qui conviendra surtout selon nous aux enfants entre huit et onze ans. Bien que les méchants de Disney apparaissent dans cette histoire d’une façon assez inédite, ne pas les avoir connus auparavant pourrait être une bonne chose, tant leur traitement est beaucoup brouillon ici. Il semble clair que ce premier tome pose des bases pour une saga mais son intrigue est bien trop sous-développée et l’une des facheuses conséquences de disséminer trop peu de paramètres dans le récit est de sortir de nulle part des dénouements grossiers. La construction de l’intrigue autant que la description du monde de City of Villains demandent au final plus de perfectionnement. Seul le temps – ou plus précisément, les prochains livres de la série – nous dira si cette saga d’Estelle Laure a un vrai potentiel.



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