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les indestructibles 2
Affiche Les Indestructibles 2

Les Indestructibles 2 : la famille Parr est de retour

Dans Les Indestructibles 2, plus soudée que jamais après son triomphe sur Syndrome, la Superfamille Parr tente de s’épanouir le plus normalement possible dans le meilleur des mondes… Mais l’arrivée du Démolisseur vient bouleverser à nouveau leur quotidien. A côté de cela, Hélène, se voit projetée sur le devant de la scène super-héroïque, tandis que son époux Bob découvre les mille et une missions qui lui incombent en tant que père au foyer. Le changement de rythme est difficile pour la famille, d’autant que personne ne mesure réellement l’étendue des incroyables pouvoirs du petit dernier… Lorsqu’un nouvel ennemi fait surface, la famille et Frozone doivent s’allier comme jamais pour déjouer son plan machiavélique.

Les Indestructibles 2 : quatorze ans après…

Considéré à plus d’un titre comme un modèle du genre super-héroïque au cinéma, Les Indestructibles, sorti en 2004, a révolutionné l’idée que le public se faisait de ces personnages, qui jusqu’alors n’étaient traités en grande partie que par le prisme de leurs aventures et non leur quotidien de tous les jours. Le réalisateur Brad Bird change cette idée, et par la même occasion le paysage cinématographique et audiovisuel en introduisant un nouveau type de héros, qui va occuper une place à part grâce à ses préoccupations du quotidien proches de celles du spectateur. Brad Bird réussit son pari avec les studios d’animation Pixar en s’attachant davantage à la dynamique entre ses personnages que leurs super-pouvoirs. Sacré meilleur film d’animation aux Oscars, encensé par la presse comme le public, devenu l’une des franchises les plus valorisées sur le blason Pixar, Les Indestructibles a rapporté plus de 633 millions de dollars de recettes mondiales. A cette époque, Pixar et Disney flirtent avec le succès, quelques années avant que la lampe de Luxo soit phagocytée par la Souris impériale.

Les Indestructibles 2

C’est dire si l’attente était immense pour la suite du film une quinzaine d’années plus tard. Et si entre temps, Disney et Pixar ont été plutôt fébriles à l’idée d’exploiter le filon indestructible dans leurs parcs à thèmes notamment, c’est sans doute parce que l’univers iconoclaste qui s’y rapporte est bien plus complexe qu’il n’y paraît. Il s’agit déjà d’un monde de Pixar totalement habité par des humains, dans un environnement plus mature que d’autres hits du studio comme Monstres & Cie, Toy Story ou Cars. La tâche d’adaptation dans un Parc n’en n’aurait été que plus ardue. Deuxièmement, le super-héroïsme est légion depuis les années 2000 au sein des grandes majors américaines et la transposition de l’écran au réel n’a jamais été chose simple pour des licences comme Marvel ou DC Comics. Et de son côté, le réalisateur créatif Brad Bird attache une importance à ses personnages : nul doute qu’il aurait pu mettre son grain de sel pour éviter que Disney ne trahisse son imaginaire. Il faudra attendre finalement l’été 2018 pour que la famille Parr bénéficie d’une attraction digne de ce nom, à l’occasion de la rethématisation de la zone Paradise Pier au parc Disney California Adventure en Pixar Pier : des montagnes russes Incredicoaster (anciennement California Screamin’) qui se payent le luxe de promouvoir la suite tant attendue par les fans du monde entier, Les Indestructibles 2.

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Il serait en revanche, malhonnête, d’affirmer que Pixar a totalement délaissé notre famille Parr en quatorze ans. Ainsi, le studio d’animation a chargé en 2004 l’éditeur THQ de développer et sortir un jeu, racontant la suite des aventures de nos héros tant au cinéma que dans les jeux vidéos justement, précédemment sortis. Il a également planché durant la production du premier film, sur un court-métrage dédié au malicieux Jack-Jack, le dernier-né de la famille : Baby-Sitting Jack Jack est proposé dans le contenu bonus de l’édition vidéo du long-métrage.

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Les Indestructibles 2 est officialisé par Disney en même temps que celle de Cars 3, le 18 mars 2014, lors d’une réunion des investisseurs de The Walt Disney Company, alors que Pixar souhaitait, s’il l’on en croit les déclarations officielles de l’époque, valoriser davantage la production de films originaux que de suites. Et si Brad Bird a longuement hésité à se mettre au travail sur ce second opus, le deal officieux entre lui et les Walt Disney Studios, lui offrant la possibilité de réaliser son rêve avec le film À la Poursuite de Demain, aura eu raison du réalisateur, qui va même accélérer la cadence de l’écriture du film pour lui offrir une sortie anticipée d’un an en 2018.

Brad Bird le Créateur

Brad Bird est depuis longtemps considéré comme l’un des créateurs les plus inventifs, les plus doués et les plus passionnés du cinéma. Avant d’entrer chez Pixar, il a fait des débuts de réalisateur de long métrage très remarqués en 1999 avec le film d’animation Le Géant de Fer, dont il a coécrit le scénario. Accueilli avec enthousiasme aussi bien par le public que par la critique, le film a remporté dix Annie Awards décernés par l’International Animated Film Society dont celui du meilleur long métrage d’animation. Brad Bird est ensuite entré chez Pixar. Réalisateur et scénariste du premier film Les Indestructibles, dans lequel une famille de super-héros est obligée de mener discrètement une vie ordinaire, il prêtait en outre sa voix au personnage d’Edna Mode dans la version originale. Le film a valu à Brad Bird son premier Oscar du meilleur film d’animation et a remporté celui du meilleur montage son. Il a été nommé dans deux autres catégories dont celle du meilleur scénario original pour Brad Bird. Il a également été nommé au Golden Globe du meilleur long métrage de comédie. En 2007, Brad Bird a écrit et réalisé Ratatouille, le film d’animation Pixar qui lui a valu son second Oscar du meilleur film d’animation. Le film ayant pour héros un petit rat qui rêve de devenir cuisinier a été nommé à quatre autres Oscars dont celui du meilleur scénario original pour Brad Bird. Brad Bird a commencé à réaliser son premier film d’animation à 11 ans et l’a achevé trois ans plus tard. Sa création fut remarquée par les studios Disney, et il avait 14 ans lorsque Milt Kahl, l’un des « Neuf Vieux Messieurs », les animateurs légendaires des studios, le prit sous son aile. Brad Bird travailla par la suite comme animateur chez Disney et pour d’autres studios. Il a été consultant sur la série animée à succès Les Rois du Texas et sur Les Simpson, les deux séries d’animation les plus populaires de tous les temps et qui ont connu la plus longue durée de diffusion. Il a en outre réalisé plusieurs épisodes mémorables des (Les) Simpson, dont « Krusty est viré » et « Tel père, tel clown ». Il est aussi le créateur – scénariste, réalisateur et coproducteur – de l’épisode « Family Dog » des Histoires fantastiques de Steven Spielberg. Brad Bird a par ailleurs écrit le scénario du film en prises de vues réelles Miracle sur la 8ème Rue, réalisé par Matthew Robbins. Il a par ailleurs réalisé deux films en prises de vues réelles. En 2011, Mission : Impossible – Protocole Fantôme, quatrième opus de la série dont Tom Cruise incarne le héros. Énorme succès mondial, le film Paramount Pictures a rapporté près de 700 millions de dollars dans le monde. Et en 2015, il a écrit, réalisé et produit À la Poursuite de Demain pour Walt Disney Studios, dans lequel il dirigeait George Clooney, Birtt Robertson et Hugh Laurie.

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Cette carrière impressionnante est proportionnelle au talent du cinéaste, qui, qu’on le veuille ou non a une patte, reconnaissable dans chacun de ses films. Les Indestructibles 2 n’échappe pas à ce traitement si particulier du réalisateur qui démontre, une fois encore, toute sa maestria, à passer de la direction d’acteurs en chair et en os à celle de personnages en images de synthèse. D’autant que beaucoup de défis s’imposaient naturellement au studio Pixar avec cette suite : tout d’abord, faire face à l’avancée technologique exponentielle de l’animation, tout en gardant une authenticité souhaitée par rapport à l’univers mis en place dans le premier volet. Il est vrai, l’animation des années 2000 n’est certainement plus la même qu’à la fin des années 2010. Il est encore plus redoutable à notre époque de mettre en scène des super-héros en film d’animation quand les effets spéciaux, repoussant les limites de leur art, sont utilisés de manière qualitative dans les productions Marvel, DC etc. Enfin, une suite, même si elle est fantasmée et attendue par des millions de fans à travers le monde, peut se confronter à la célèbre malédiction de la suite dite « foireuse ».

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Pixar donne une leçon d’élégance à Marvel

Et pourtant, sans grande difficulté, Les Indestructibles 2 surpasse ces épreuves et va même jusqu’à monter d’un cran le degré d’exigence du genre super-héroïque au cinéma dans une année forte en émotion avec Avengers Infinity War et Black Panther, qui ont su de leur côté, transformer l’essai d’une suite réussie pour l’un, et de l’intégration convaincante d’un nouvel univers pour l’autre. D’un bout à l’autre du film, Brad Bird flirte avec l’excellence dans la direction artistique : c’est bien simple, là où des confrères comme John Lasseter ou Pete Docter, nous ont réjouis par le passé de film en film, Brad Bird arrive quant à lui à nous surprendre, notamment dans la finesse du trait graphique en 3D. On se plongera très aisément dans la comparaison entre les deux opus et les améliorations sont spectaculaires, des mouvements aux textures en passant par le détail prononcé de chaque visage ; sans parler des décors, qui offrent une vision plus dynamique à l’environnement dans lequel vivent nos héros, contrairement au premier, qui faute de moyens technologiques à l’époque, était davantage marqué par une certaine froideur et figeage. Par ailleurs – et Brad Bird, l’a prouvé dans sa filmographie tant disneyenne (A la Poursuite de Demain) que non disneyenne (Mission Impossible : Protocole Fantôme) – Les Indestructibles 2 porte le genre du film d’action à un niveau bien plus impressionnant que ne l’ont pu le faire des récentes productions en prises de vue réelles. Chaque scène où la castagne et les missions à risque sont en jeu sont autant de sophistication visuelle et d’intensité dramatique, tout en gardant à l’esprit une certaine idée du réalisme dans l’animation. Brad Bird et ses équipes maitrisent l’espace sans pour autant s’extirper du fond même de son travail, la mise en valeur de la psychologie de ses personnages.

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Et si Les Indestructibles 2 tacle gentiment les créatifs de Marvel Studios en suggérant plutôt qu’exacerbant, à l’orfèvrerie de la mise en scène s’adjoint celle sur l’émotion. Car, il n’aura pas échappé à quiconque connaissant un tant soi peu cet univers, que le terreau familial fait littéralement pousser les arcs scénaristiques du premier film mais également du second. La famille Parr est le centre de toutes les attentions de leur papa et Brad Bird se tient à maintenir ce cap. C’est là où l’âme de Pixar surgit comme par magie et bien que ce film ne prolonge pas les bonnes vieilles recettes du studio à la lampe de bureau (comme la double lecture si chère à Brad Bird pourtant), tout est savamment mis en place pour émouvoir le spectateur, qui quatorze ans plus tôt, avait laissé dans un coin de sa tête cette célèbre famille. C’est là où le cinéma d’animation prouve qu’il peut se permettre tout, en reprenant le récit là où il s’était arrêté précédemment, comme si plus d’une décennie n’avait jamais éraflé l’intégrité de nos personnages. Brad Bird redouble d’ingéniosité pour affirmer cette intemporalité en mélangeant le style rétro des années 1960 à une forme de modernité qui lui est propre, le tout dans une histoire d’espionnage, vecteurs de nostalgie et d’évasion, notamment pour les lecteurs de comics.

La famille Parr est le centre de toutes les attentions de leur papa et Brad Bird se tient à maintenir ce cap.

Famille banale ou extraordinaire ?

Brad Bird redéfinit partiellement les codes du film de super-héros de manière prosaïque comme il l’avait fait pour le premier film. Partiellement en effet, car les aléas de la vie de famille et l’exploration de la jeunesse des trois enfants Parr sont des idées brillamment concrétisées dans le film ; mais, la mise à pied des super-héros est un projet scénaristique totalement suranné en 2018 quand des X-Men dans les années 2000 jouaient déjà au cinéma avec ce type de procédé, basé sur la discrimination, la différence, l’acception de l’autre. Deuxième point qui nous chagrine : la nouvelle donne du schéma familial, là encore, très passéiste voire ringard. Maman (Hélène alias Elastigirl) se retrouve au premier plan de l’action tandis que Papa (Bob alias M. Indestructible) n’a d’autre choix que de se transformer en Mère Poule, débordé par les missions qui l’incombe, que ce soit l’éducation du petit dernier Jack Jack (la valeur sûre du film soi-disant passant) qui se découvre une multitude de pouvoirs plus ou moins incontrôlables, le suivi de la scolarité de son fils Flèche (les devoirs de mathématiques n’ont jamais été aussi drôles au cinéma) ou la compréhension des problèmes de la crise d’adolescence et d’amourettes rencontrés par Violette. Mais ce choix n’est-il pas finalement le signe que Brad Bird souhaite rétropédaler volontairement dans sa vision même de la famille et des turbulences qu’elle rencontre ? Finalement, les contradictions sociales propres à la famille sont vendues par Brad Bird comme quelque-chose de plus blasant qu’autre chose car pérennes. Les attributs socio-psychologiques de la Famille nourrissent le récit, très prévisibles certes, mais assez bien traités pour mener à bien l’entreprise : famille ordinaire comme extraordinaire, famille tortueuse comme famille qui fait front, famille unique comme famille banale, famille dysfonctionnelle comme famille harmonieuse. Sans grande audace donc, Brad Bird traite une fois encore brillamment de ce concept : mais c’est ce qui fait la force dans la contradiction même du film, qui se veut à la fois grande épopée d’action et simple fable de la relation familiale dans une certaine vision de la quotidienneté. Le pragmatisme légèrement fainéant de Brad Bird et sa volonté d’offrir au spectateur un grand divertissement dénotent à quel point le cinéaste n’est pas exempt de nuances et d’imperfections dans son travail global et c’est sans doute pour cette raison que le film s’immerge avec plaisir dans l’élégance et le grand spectacle hollywoodien.

 

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