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Peter Pan, La Belle et le Clochard et Les Aristochats supprimés des profils enfants sur Disney+

Que restera-t-il de l’art et de la création si même des films comme Les Aristochats sont jugés ouvertement racistes et dangereux dans l’auto-critique que s’applique Disney depuis plusieurs mois maintenant ? L’idée de recontextualiser tous les films pointés du doigt pour leurs travers et leur décalage était en soi intéressante et faisait appel à la pédagogie des plus grands pour expliquer aux nouvelles générations que certains messages véhiculés dans ces films avaient désormais une certaines teneur passéiste, révisionniste ou totalement offensante pour des communautés. Mais Disney a voulu monter la barre d’un cran cette fois-ci…

Disney+, un « safe space » pour son jeune public

On apprend en effet que la Maison de Mickey a acté la suppression de plusieurs de ses Grands Classiques de l’animation Disney pour les profils « enfants » sur sa plateforme de vidéo à la demande. Autrement dit, le jeune public qui a accès au service de vidéo à la demande ne pourra désormais plus voir Peter Pan, La Belle et le Clochard ou encore Les Aristochats, sauf si un adulte se connecte sur son propre profil pour les lui montrer. L’idée sous-tendue est donc d’inciter les parents à expliquer à leurs enfants ce qui va ou ne va pas dans ces films quand on les regarde par le prisme de 2021. Mais cela revient aussi à remettre en cause la responsabilité, l’autonomie et le discernement de ces mêmes enfants.

Disney+ avait déjà mis en place un système de bandeau informatif avec avertissement, diffusé avant certains de ces films pour alerter les spectateurs de certaines scènes pouvant être mal perçues pour les messages racistes qu’elles transmettent. Signalons au passage que cette prévention n’est en place seulement que sur la plateforme, les films continuant à être diffusé à la télévision ou proposé sur support vidéo physique ou digital sans ces indications préliminaires, et ce pour tous (incluant les enfants). Il y a donc un véritable problème qui se pose : Disney doit aller au bout de sa démarche et s’autocensurer partout ou faire marche arrière selon nous, les enfants ayant toujours accès à la télévision ou à leur DVD préféré… Au mieux, Disney doit prolonger sa démarche d’avertissement sur tous les supports de diffusion de ces films.

La censure selon Disney, tout ou rien

Enfin, concernant la décision en elle-même pour Disney+, elle pose forcément question. Oui, ces films ne sont pas sans défauts. Oui, ils peuvent avoir un effet plus ou moins impactant sur le jeune public. Oui, le racisme est à combattre sous toutes ses formes et ces avertissements mis en place sont une excellente idée, touchant des millions de spectateurs. Mais non, ces films ne sont clairement pas dangereux pour autant. Seules certaines scènes peuvent l’être et ça n’est donc clairement pas du tout comparable d’aucune commune mesure que ce soit avec un film comme Mélodie du Sud où l’intégralité du scénario s’appuie sur une vision raciste de l’Amérique. Il y a un véritable travail de médiation des parents à faire et ce n’est pas à la société de faire ce travail à leur place.

Non, ces films ne doivent pas être censurés de la sorte. C’est aller justement à contrario de ce combat que de les bannir définitivement de l’offre jeunesse sur Disney+. Mettre un message d’avertissement sur ces films sur les profils « adultes » et bannir ces mêmes films pour les profils « enfants » revient à dire que ces enfants sont considérés comme un sous-public. Laissons ces jeunes spectateurs grandir avec ces films, laissons les adultes les accompagner dans leur compréhension en leur permettant de faire le pont avec le monde qui les entoure, laissons enfin aux enfants le droit de rêver, de s’évader, de se faire aussi leur propre réfléxion. C’est en supprimant ces films pour eux que Disney réduit ces œuvres à leurs représentations ethniques, aujourd’hui vues comme du racisme (à juste titre). Mais c’est aussi oublier à quel point ces films ont un pouvoir incommensurable sur leurs jeunes téléspectateurs pour leur offrir un divertissement sans bornes.

Les stéréotypes ne sont plus dénoncés mais effacés

Quand on pense à la violence présente dans les contes pour enfants – dont beaucoup ont inspiré des films Disney – doit-on se dire, qu’à terme, les livres originaux aussi subiront le même sort et sortiront des librairies jeunesse ? Bref, vous l’aurez compris, autant les messages d’avertissement étaient vraiment les bienvenus, autant cette censure est de trop. Disney, à force de trop vouloir avoir honte de son héritage, transmet un message de division, à l’inverse de ce qu’elle entendait proposer au départ dans sa démarche anti-raciste. À l’heure où les caricatures journalistiques sont condamnées par une partie de la société, nous ne voulons pas d’un univers Disney pasteurisé où les stéréotypes passés ne sont plus dénoncés, où les messages racistes ne sont plus critiqués et expliqués mais où, au contraire, tout est globalisé, schématisé et enfin, simplement mis sous cloche, au nom des susceptibilités pernicieuses de chacun. La culture du banissement a de beaux jours devant elle si même un film comme Les Aristochats est désormais blacklisté pour son public cible !

À ce compte là, autant supprimer quasiment TOUS les Disney des profils « enfants » de Disney+. Blanche Neige et les Sept Nains pourrait très bien être vu comme un film de propagande de la culture du viol et de la misogynie. Et que dire du carnisme du (Le) Roi Lion, de la grossophobie de Fantasia, du sexisme de La Belle au Bois Dormant, de la caricature de la mythomanie dans Pinocchio, de la maltraitance animale des (Les) 101 Dalmatiens, de l’appropriation culturelle dénoncée par certains dans Mulan, Aladdin ou Vaiana, La Légende du Bout du Monde ? Des exemples parmi d’autres… Tout est sujet à débat, mais rien ne justifie pour autant leur censure. Dans cette bataille du tout streaming, Disney ne se risquerait pas à aller plus loin, c’est à dire entamer tout le prestige de son catalogue historique et bientôt séculaire en censurant ici et là. Ce catalogue reste avant tout son premier atout commercial pour sa plateforme. Si Disney+ ne devient plus qu’un « Safe Space » à l’avenir, le SVOD de Mickey n’aura plus aucun intérêt et ne se distinguera clairement plus de Netflix et Amazon Prime Video, ses concurrents directs… mais c’est un autre débat !

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2 Commentaires

Captain Hook 2 juillet 2022 at 18 h 56 min

Cette censure pratiquée par Disney est d’autant plus critiquable que cette firme s’est engagée dans une propagande systématique en faveur de la pensée woke et des mouvements LGBTQ+ non seulement dans les films mais également dans les parcs d’attraction même à l’égard des enfants innocents qui doivent être préservés de la propagande pour des modes de vie qui ne font pas l’unanimité mais que Disney présente comme un idéal. Espérons que les actionnaires vont réagir en voyant que l’action a perdu 50% de sa valeur boursière en un an sinon ce sera la faillite.

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mrchwn 17 février 2023 at 20 h 30 min

Je suis tout à fait en phase avec vous, et sûrement beaucoup de monde aussi. Le problème, c’est que l’activisme de ces gens est plus visible que notre pensée. Le seul moyen de s’en sortir sera d’être actif aussi, en espérant que les gens normaux puisse peser dans la balance…

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