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Empire of Light – Critique du film Searchlight Pictures

Dans Empire of Light, Hilary est responsable d’un cinéma dans une ville balnéaire britannique et tente de préserver sa santé mentale fragile. Stephen est un nouvel employé qui n’aspire qu’à quitter cette petite ville de province où chaque jour peut vite se transformer en épreuve. En se rapprochant l’un de l’autre, ils vont apprendre à soigner leurs blessures grâce à la musique, au cinéma et au sentiment d’appartenance à un groupe…

Empire of Light de Sam Mendes est un très beau film porté par une Olivia Colman bouleversante. Le long-métrage est à la fois une déclaration d’amour au cinéma mais aussi une histoire d’amour de deux êtres qui vont se soutenir mutuellement malgré leurs différences dans l’Angleterre du début des années 1980.

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Le pouvoir du cinéma selon Sam Mendes

Quand l’épidémie de la Covid-19 déferla sur le monde au début de l’année 2020, tous les pays se sont mis en pause et ont stoppé toutes leurs activités y compris les salles de cinéma pour une durée indéterminée. Une situation inimaginable car le septième art a survécu à toutes les crises y compris les guerres mondiales et les crises économiques. La pandémie a profondément bouleversé les habitudes des spectateurs qui désormais, sont plus sélectifs pour voir des films en salles et préfèrent se tourner sur les plateformes de streaming.

Les salles ont depuis rouvert leurs portes mais la crise demeure car désormais, les films qui fonctionnent sont plus commerciaux et grand public et les films dits d’auteurs ne parviennent plus à faire déplacer le public en salles pas même ceux de Steven Spielberg. West Side Story a essuyé un gros échec (ô combien cruel tant son adaptation de la comédie musicale est formidable) et son film autobiographique The Fabelmans n’a pas eu le succès escompté malgré ses multiples nominations.

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Depuis plusieurs mois, on assiste à une tendance à Hollywood avec des films qui célèbrent le cinéma, réalisés par de grands auteurs. On peut parler de Steven Spielberg avec The Fabelmans, Babylon de Damien Chazelle ou encore de Once Upon a Time in Hollywood de Quentin Tarantino. Avec Empire of Light, Sam Mendes raconte une histoire certes non révolutionnaire mais qui parvient à distiller des messages sur l’importance d’une salle de cinéma (mais pas que).

Empire of Light, un film sur les relations humaines

Empire of Light suit l’histoire d’Hilary Small (Olivia Colman, magistrale), une femme solitaire et dépressive qui a vécu un lourd traumatisme. Elle est gérante du cinéma Empire situé dans une banlieue sur la côté nord du Kent en Angleterre. Hilary va retrouver goût à la vie grâce à l’arrivée de Stephen (Michael Ward, grande révélation), un jeune employé qui va travailler au cinéma pour payer ses études d’architecture à l’université de Bristol.

Malgré leur différence d’âge et de condition sociale, Hilary et Stephen vont être attirés l’un par l’autre et vivre une relation amoureuse. Au-delà de cette histoire d’amour, les deux protagonistes vont s’écouter, se soutenir malgré les épreuves que chacun endure au quotidien en dehors du travail. Ici, Sam Mendes nous raconte avant tout une rencontre entre deux personnages cabossés par la vie. Le film explore la psychologie de ces deux personnages de manière équitable sans pour autant trouver une véritable résolution à leurs problèmes.

Empire of Light offre un regard magnifique et sincère sur une personne qui essaie juste de s’en sortir. Hilary a un problème de santé mentale très handicapant dans ses relations sociales notamment. Le lithium qu’elle prend l’aide en partie mais cela altère sa personnalité. Elle est heureuse avec Stephen et choisit d’arrêter le médicament parce qu’elle préfère profiter d’une émotion authentique. Les choses vont forcément mal tourner, mais ce que Sam Mendes livre avec son scénario et Olivia Colman avec sa performance ne fait jamais honte à Hilary pour ses choix. Il ne sera pas difficile d’éprouver de l’empathie pour ce personnage. Le cinéaste lui apporte une certaine force de continuer et rappelle à son public que les problèmes de santé mentaux ne sont pas des problèmes médicaux de seconde zone. Il ne juge, ni n’insulte jamais ni ne se moque des problèmes d’Hilary, mais célèbre plutôt sa résilience et sa force, pour essayer de s’en sortir dans la société de tous les jours.

Olivia Colman a prouvé son talent dans plusieurs rôles, mais ici, dans la peau de Hilary, elle fait de sa performance une centrale fascinante d’émotions brutes, silencieuses et enveloppées dans un désir de vivre. Hilary est une personne « normale » (si tenté que cela existe), qui peut occuper un emploi, avoir des amis et même des relations. Il n’y a pas de honte dans les démons qu’Hilary combat. C’est ce dont le public se souviendra longtemps après la fin du film.

Michael Ward affiche magistralement une forme de compassion permanente dans son personnage à travers sa relation avec Hilary. Stephen est la seule personne qui essaie de comprendre Hilary, qui veut l’aider et qui l’aime même pour ce qu’elle est, ni plus ni moins. Lorsque le pire de la maladie d’Hilary la pousse à se fermer au monde extérieur, Stephen est toujours là pour essayer de l’aider. Il ne la juge pas, ne l’ignore pas et n’essaie même pas de l’oublier. Il est probablement un modèle de vertu pour toute personne qui se sentirait démunie face à la maladie mentale qui touche l’un de ses proches. C’est un homme qui affiche les parties les plus chères et les meilleures de l’esprit humain. La représentation réfléchie, stoïque et aimante de Michael Ward aide le public à se connecter à ce qui se passe de manière personnelle. Tout le monde peut être Stephen, et l’acteur nous évoque peut-être ce que nous ferions si nous étions à sa place.

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Autour d’Hilary et Stephen gravitent leurs collègues du cinéma Empire. Le patron du complexe Donald Ellis (Colin Firth) a une relation particulière et profondément malsaine avec Hilary. Viennent ensuite Neil (Tom Brooke) et Janine (Hannah Onslow), les collègues d’Hilary qui accueillent les spectateurs et enfin Norman (Toby Jones), le projectionniste qui va montrer à Stephen l’envers du décor lorsque les films sont montrés à l’écran.

L’autre personnage principal du film est le cinéma Empire en lui-même, le lieu où évoluent les personnages. C’est dans ces allées qu’ont lieu les scènes les plus importantes du film dont une très dramatique. Si en apparence, il parait banal, ce complexe est l’antre des plus belles salles rappelant celles du vieil Hollywood. C’est d’ailleurs ce cinéma qui va accueillir certaines avant-premières dont celle des (Les) Chariots de Feu en 1981 (ce qu’on voit dans le film). Le film permet également d’entrer là où le public ne va jamais, dans le lieu où la magie commence à l’écran, la salle de projections où sont stockées les bobines de films.

Une écriture un peu fourre-tout mais une réalisation sublime

Empire of Light est le second film écrit par Sam Mendes après 1917 sorti en 2020 juste avant la pandémie. Après le spectaculaire drame de guerre, le réalisateur britannique revient vers un registre plus intimiste, plus épuré mais qui souffre singulièrement d’un air de déjà-vu et on sent que le réalisateur veut raconter plusieurs histoires en une alors que le film ne dure qu’une heure et cinquante minutes.Il n’en reste pas moins que le metteur en scène réussit à canaliser les propres luttes de sa mère pour faire la lumière sur la santé mentale d’une manière finalement douce et respectueuse.

Il est un tout petit peu regrettable que l’intrigue sur le rapport avec le cinéma soit reléguée au second plan, mais le choix du lieu amène une certaine profondeur dans le récit. La possibilité de voir une variété d’histoires jouées dans une salle de cinéma rassemble les gens. Le souffle collectif devant une scène effrayante, la joie devant le succès du héros ou les larmes devant un moment émouvant d’une histoire partagée avec d’autres ne ressemblent à rien d’autre au monde. Sam Mendes raconte une histoire dans Empire of Light qui nous avertit de prendre soin des autres en tant qu’êtres humains. L’appartenance à un groupe peut être un facteur de guérison.

Néanmoins, Sam Mendes parvient, grâce à la sublime photographie de Roger Deakins (qui oppose la luminosité des néons du cinéma à la confusion grise de la foule) et la musique obsédante de Trent Reznor et Atticus Ross, à offrir un film de toute beauté qui parvient à traiter avec justesse des thèmes lourds comme la maladie mentale ou le racisme via le mouvement radical Skinhead, dans un climat politique britannique tendu au début des années 1980.

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Empire of Light n’est certes pas le chef-d’œuvre attendu mais reste que Sam Mendes signe un très beau film de cinéma d’auteur qui mérite d’être vu sur grand écran.



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