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Landscape (RONGW_002A_G - Teaser Quad)

Ron Débloque – Critique du Film 20th Century

Sorti le 20 octobre 2021 dans les salles françaises, Ron Débloque (Ron’s Gone Wrong) est un film d’animation produit par les jeunes studios anglais Locksmith et distribué par 20th Century Studios à travers le monde. Le film d’une durée de 1h47 propose de suivre l’histoire de Barney, un collégien un peu en marge de ses camarades, et de Ron, un robot de dernière technologie mais quelque peu défectueux… À travers une aventure centrée autour de l’amitié, le film d’animation souhaite rappeler les valeurs essentielles d’une amitié la plus simple et authentique.

Un regard frontal sur le monde connecté

Ron Débloque, réalisé par Sarah Smith et Jean-Philippe Vine accompagnés à la co-réalisation d’Octavio Rodriguez, est avant tout un film sur l’amitié à l’ère des réseaux sociaux, du monde ultra connecté où on devient ami en s’envoyant une demande d’ajout et où on s’approuve les uns et les autres à grand renfort de « like ». Abordant un sujet aussi actuel, le film cible la génération d’enfants et adolescents en plein dans ce nouveau mouvement technologique et qui dans son utilisation extrême annihile une bonne partie des rapports humains. L’histoire suit de près Barney Pudowski, seul collégien de son établissement scolaire à ne pas posséder un « B-Bots », un robot connecté permettant de se faire des amis et d’entretenir sa communauté. À son anniversaire, son père et sa grand-mère réussissent à lui procurer un exemplaire de ce compagnon robotique sans réaliser que celui-ci est complètement défectueux.

ron débloque

Dès sa rencontre avec celui qui se dénommera Ron, Barney réalise que le robot ne fonctionne pas normalement, ne se connecte pas au réseau et est donc dépourvu de tous les atouts qui en font le compagnon indispensable pour tout collégien qui se respecte. D’abord agacé et souhaitant même aller l’échanger, le jeune garçon finit par développer une réelle amitié pour le robot au fur et à mesure qu’il découvre les failles de ce dernier et qu’il passe du temps à lui apprendre manuellement comment être un « meilleur ami prêt à l’emploi » pour reprendre le slogan de vente des « B-Bots ». Gentillement moralisateur, Ron Débloque centre son intrigue autour de l’abus d’utilisation de ces technologies qui remplacent les vrais échanges. Quand les collégiens ne discutent plus qu’à travers les écrans de leur « B-Bots », Ron dépourvu de ces capacités dernières générations va à la rencontre directe des personnes dans la rue, leur collant des post-it « demande d’amis » sur le pantalon pour les encourager à devenir ami avec Barney. Le collégien de son côté crée dans la cabane à l’arrière de sa maison un véritable tableau de bord sur la manière d’être son ami, concevant artisanalement sans le savoir la ligne de codage qui programme son « B-Bots » en un être bien plus authentique que les milliers d’autres exemplaires qui se contentent d’analyser une banque de données personnelle sur leur propriétaire.

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C’est cette même ligne de code complètement personnalisée qui viendra remplacer celle de tous les autres « B-Bots » à la fin du film, renouant ainsi avec l’idée originelle du créateur de ces robots, Mark, de faire de ces compagnons des aides à l’amitié et non des substituts technologiques à cette dernière. Le film d’animation ne propose ici donc pas un sujet très original en abordant les  réseaux sociaux autant que les progrès technologiques, le tout sur fond d’un personnage marginal, comme pouvait déjà le faire Les Nouveaux Héros (le design de Ron n’étant d’ailleurs pas sans rappeler un Baymax « friendly » miniature) ou bien Ralph 2.0.

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Mais Ron Débloque va de ce point de vue plus loin en proposant un regard sans détour sur les dérives que cela peut avoir en grande partie sur une tranche d’âge encore trop fragile, influençable et dépendante d’un monde technologique sur lequel il leur est difficile d’avoir suffisamment de recul. Sans atteindre la critique acerbe, bien que s’en rapprochant, des épisodes de la série Black Mirror, le film d’animation semble toutefois porter un message fort aux plus jeunes.

Une bienveillance naïve mais agréable confrontant un scénario assez léger 

Si le message du film est ainsi louable et sans détours, emprunt d’une bienveillance indéniable, le scénario fébrile et les personnages stéréotypés le rendent hélas peut-être un peu naïf. L’histoire commence en effet de manière prometteuse avec ce robot défectueux au caractère qui s’affirme d’instant en instant. Mais dès que les bourdes de ce dernier commencent, le scénario devient une surenchère de gags qui ne s’arrêtent plus jusqu’à la scène où tous les « B-Bots » de la cour de récréation s’adonnent à une violence sans retenue tout en s’empilant pour donner une espèce de King Kong démoniaque qui terrorise le collège. La scène s’achève sur un humour plus que douteux en humiliant la jeune populaire de l’établissement

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L’axe final dans lequel Barney et sa famille partent au siège pour sauver le Ron original sauvegardé dans le Cloud de la maison mère, aidés par Marc, le créateur originel privé de ses fonctions dans l’entreprise par son associé véreux et vénal, manque également de sobriété et de cohérence. Barney s’adonne à un parcours inutilement  voire gratuitement dangereux pour atteindre son but. De manière générale, le scénario, sympathique par bien des aspects ne tourne pas moins en rond avec des séquences qui auraient parfois mérité un peu de modération. L’histoire n’en embarque toutefois pas moins le spectateur notamment grâce au personnage de Ron très bien travaillé. C’est l’acteur Zach Galifianakis qui prête sa voix à ce personnage dans la version originale du film. En France, le choix s’est porté sur le comédien Marc Arnaud, un certain Duke Caboom dans Toy Story 4.

Le petit robot Ron possède une personnalité à la fois attachante, pleine de qualités appréciables comme sa bienveillance et sa persévérance, et ses maladresses ou son caractère parfois boudeur ne participent que plus à le faire apprécier du public. Son design épuré, le différenciant de ses homologues autant que son petit bonnet de laine sur la tête, tricoté par la grand-mère, et rappelant encore l’approche plus authentique de ce personnage par rapport aux autres robots est également très bien pensé. Il aurait été appréciable que tous les autres personnages bénéficient d’un même traitement et ne correspondent pas seulement aux stéréotypes habituels du harceleur, de la populaire, de la douée en sciences…

Même le créateur des robots Marc (Justice Smith en VO, Emmanuel Garijo en VF) n’est que peu approfondi alors qu’il aurait été au contraire très intéressant d’exploiter son personnage et d’en apprendre peut être plus avec lui sur l’origine du projet. Barney (Jack Dylan Grazer en VO, Aloïs Agaësse-Mahieu en VF) profite pour sa part de l’aura bien travaillée de Ron qui le fait lui même sortir du carcan resserré du marginal qui réussit à se faire des amis. L’épopée qu’il traverse avec son robot permettant de le confronter à ses craintes comme à ses capacités, lui permet de développer une personnalité attachante et proposer un modèle dans lequel le jeune public peut s’identifier. Donka (Olivia Colman en VO ; Denise Metmer en VF), l’adorable grand-mère bulgare de Barney, permet en partie au film d’adopter son ton comique, sans sacrifier l’émotion. Ed Helms est le noyau étonnamment émotionnel du film, campant le père de Barney (en VF, il s’agit de Arnaud Bedouët) qui a du mal à comprendre comment donner à son fils ce dont il a besoin.

Un univers prometteur mais peu exploité sur fond d’une animation réussie mais sans prétention

L’univers dans lequel se déroule l’histoire de Ron Débloque est plutôt intéressant, sans être exceptionnellement original. Ce monde futuriste semble encore très proche du nôtre, animé par la seule technologie des « B-Bots » qui dépasse les autres et s’oppose aux innovations dépassées comme essaie encore d’en concevoir le père de Barney. Les magasins des petits robots autant que la maison mère ne sont pas sans rappeler la marque Apple par leur côté épuré, faisant la belle part aux teintes blanches et aux espaces vitrés tandis que son fonctionnement peut évoquer les grandes entreprises de la Silicon Valley comme Facebook. Le duo d’associés est composé du créateur à la vision utopique – Marc – et son opposé attiré uniquement par le profit et les intérêts prêt à s’asseoir sur la mort d’un enfant pour empocher toujours plus de gain. Si ce duo peut sembler caricatural, il dépeint toutefois une réalité sans écueil qui oppose bien souvent le profit, la course aux rentrées d’argent à l’authenticité créatrice et l’éthique.

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Si les références aux univers Disney, Marvel et Star Wars ne peuvent s’empêcher de jalonner le film via les revêtements de certains « B-Bots » et quelques lignes de dialogue, les clins d’œil restent légers, bienvenus et souvent assez drôles. Pour ce qui concerne l’animation de cet univers et des personnages à proprement parler, elle est le fruit du travail de Locksmith Animation qui réalise son premier long métrage. Si l’animation en elle-même ne révolutionne rien, on peut noter tout de même un design futuriste sympathique, une colorimétrie très pop qui colle bien avec cette histoire axée sur un public assez jeune. Si des espaces comme ceux de l’école, les extérieurs ou la maison mère des « B-Bots » restent assez simplistes, la personnalisation de la maison de Barney est bien pensée entre le bureau du père qui semble vivre dans un temps révolu, la cuisine qui est le domaine de la grand-mère originaire de Bulgarie et la chambre de Barney à l’image de son propriétaire.

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Seul véritable endroit du film à proposer une certaine production de détails, cette maison apporte toute l’authenticité nécessaire à cette famille encore reliée aux valeurs aussi oubliées que les créations du père. On notera également le travail des couleurs chaudes dans cette maison s’opposant aux teintes beaucoup plus froides du siège des « B-Bots » et participant encore à creuser un contraste entre deux univers. Globalement, c’est donc une animation sans prétention mais pleine de bonnes idées qui porte un monde peut-être trop peu riche mais qui a lui aussi le mérite de s’appuyer sur des propositions intéressantes. Quant aux personnages, là encore, leur esthétique et leur dynamique de mouvements reste très convenue. Si le produit fini reste malgré tout au-dessus de la concurrence, il n’atteint pas les sommets d’exigence de studios comme Disney ou Pixar.

La bande originale du film est signée Henry Jackman qui n’en est pas à sa première collaboration avec Disney pour un film d’animation puisqu’il était derrière la partition de Winnie l’Ourson, Les Mondes de Ralph, Les Nouveaux Héros (justement !) et Ralph 2.0. Il souligne ici avec des mélodies enlevées des moments plus épiques et d’autres davantage émouvants. Par moment, elle pourra vous rappeler des airs de Soul bien qu’elle prenne des allures bien plus électroniques. Enfin, le chanteur Liam Payne interprète pour le film une chanson originale, intitulée « Sunshine ».

Ron Débloque est une histoire attendrissante

Si il est évident que Ron Débloque s’adresse à des spectateurs assez jeunes, le message peut très bien cibler une tranche d’âge plus large allant jusqu’aux collégiens. Mais l’humour léger fera que ces adolescents et jeunes adultes auront clairement du mal à se reconnaitre dans cette aventure. Le sujet du film, très actuel, permet en revanche de générer le débat entre parents et enfants sur le thème de la virtualité mais aussi du harcèlement ou de la solitude. Au cours de la dernière année, nous avons eu soif de reconnexion. Le film sort donc à point nommé. Il nous montre que même si l’amitié est désordonnée, imprévisible et surprenante, elle est essentielle. Le message est clair : passez plus de temps en dehors des écrans avec vos amis et profitez également de leur amitié.

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1 commentaire

Sab 7 novembre 2021 at 16 h 16 min

Superbe film qui traite d’un sujet d’actualité.
Le Robot est un personnage qui devient attachant.
Mes enfants ont adoré. Je conseille fortement.

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