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la reine des neiges II critique

La Reine des Neiges II – Critique du Film Disney

La Reine des Neiges II est le deuxième chapitre des aventures d’Anna et Elsa d’Arendelle. Cette dernière, souveraine depuis maintenant trois ans, maîtrise désormais ses pouvoirs mais elle commence à entendre une voix lointaine provenant du Nord et qui l’appelle. Accompagnée de sa soeur mais aussi de Kristoff, Olaf et Sven, elle entreprend un voyage incertain au-delà des frontières de sa cité, en quête de réponses sur l’origine de ses pouvoirs et pour sauver son pays.

Il est des films qui nous marquent à jamais. Assurément, La Reine des Neiges II, dernier bijou des Studios d’Animation Walt Disney, en fait partie. Le Disney de Noël 2019 peut non seulement s’enorgueillir d’être un des meilleurs films de ces dix dernières années du label mais également proposer quelque-chose de neuf. Jennifer Lee, nouvelle directrice créative des studios, poursuit le quatrième âge d’or du studio, entamé avec La Princesse et la Grenouille en 2009.

Avalanche de Princesses en 2013

En effet, les Studios d’Animation Walt Disney continuent d’émerveiller le public depuis 10 ans maintenant. Enchaînant coup sur coup les succès commerciaux et critiques, ils ont permis à Disney d’exploser les records au box-office dans le domaine de l’animation, si bien qu’en 2013, un petit film racontant l’histoire de deux sœurs a conquis le cœur des spectateurs et est devenu le film d’animation le plus rentable de l’Histoire. Il est vrai, si Raiponce avait redonné ses lettres de noblesse au conte de fées à la Disney, c’est bel et bien La Reine des Neiges, qui intelligemment écrit et renouant avec le merveilleux, ajoute un titre digne de ce nom à l’héritage Disney.

elsa anna sven olaf kristoff la reine des neiges II

Son succès phénoménal rencontré, comme jamais vu auparavant pour un film d’animation, dépasse tout ce que la firme aux grandes oreilles a pu prévoir alors. Plus grand succès animé de tous les temps avec des recettes mondiales s’élevant à 1,276 milliard de dollars – titre qu’il détiendra jusqu’en 2019 avec l’avènement du (Le) Roi Lion en images de synthèses, il s’accroche en 2019 à la 15ème position des plus grands succès de tous les temps dans le septième art. Il marque aussi l’année de sa sortie en devenant le film numéro 1 de la saison que ce soit sur le globe ou en France où il cumule 5,149 millions de tickets vendus. Sans mal, le long-métrage décroche en 2014 l’Oscar du Meilleur Film d’Animation et celui de la Meilleure Chanson pour « Libérée, Délivrée » (« Let it Go »). Cet événement cinématographique de 2013 lance également une nouvelle marque dans la pop-culture : c’est bien simple, personne ne peut échapper au phénomène culturel. Ses personnages principaux s’ancrent dans l’inconscient collectif, ses musiques sont devenues des tubes interplanétaires que les enfants (au grand dam des parents) entonnent par cœur et l’intrigue même du film devient une source sujette aux polémiques qui font tantôt du bien au débat sociétal, tantôt font l’apanage des extrémistes religieux et politiques. Tout le monde connaît de près ou de loin La Reine des Neiges et les produits dérivés de cet univers permettent à Disney de grossir ses ventes comme jamais de Noël en Noël. Tout ce qui existe sur le marché et est étiqueté de la sorte devient un gagne-pain supplémentaire pour Disney. Il n’est dès lors pas étonnant qu’en six années, le filon se soit imposé dans à peu près tous les secteurs de la société.

elsa into the unknown

Disney continue de surfer sur sa marque fétiche en la déclinant sous toutes les formes. Tout est prétexte à cultiver le mythe : des spectacles sont créés que ce soit dans les Parcs Disney (et s’intègrent souvent dans des saisons entières), les navires de la Disney Cruise Line mais aussi sur la glace ou sur les plus grandes scènes de comédies musicales, à commencer par Broadway. Des zones thématiques entières ont été ou sont sur le point de sortir de terre dans à peu près tous les Resorts Disney du monde. Tout porte à croire que le juteux filon d’Arendelle n’est pas prêt de s’arrêter. Et pour cause, les analystes financiers sont unanimes sur la longévité lucrative de cette franchise si bien que l’annonce d’une préquelle au long-métrage de 2013 ne s’est pas faite attendre. Le 12 mars 2015, Robert Iger, PDG du groupe, et John Lasseter, alors directeur créatif des Studios d’Animation Walt Disney, réunis à l’assemblée générale des actionnaires, officialisent la mise en chantier de ce second volet.

elsa anna forêt enchantée

Avant cela, les histoires d’Anna et Elsa se poursuivent de différentes manières. Destiné à une diffusion en première partie du film Cendrillon, le court-métrage La Reine des Neiges : Une Fête Givrée offre aux fans une manière de garder un lien avec leurs personnages favoris. Fin 2017, ce sont les fêtes de fin d’année et le personnage de Olaf qui sont mis à l’honneur dans le moyen-métrage La Reine des Neiges : Joyeuses Fêtes avec Olaf. Deux succès coup sur coup qui font tenir en haleine le public. Rajoutons à ces productions des déclinaisons plus originales comme des mini-séries de cartoons LEGO et de comic books sortis aux Etats-Unis chez Dark Horse Comics. Enfin, le petit écran s’empare du phénomène en mettant en scène le passé alternatif des sœurs d’Arendelle dans la série Once Upon a Time – Il Etait une Fois sur ABC. Chacune de ces nouvelles histoires n’est, malgré tout, pas canonique des deux long-métrages d’animation, qui forment un seul et unique récit. Enfin, Anna et Elsa s’offrent, comme la plupart des stars de la maison de Disney, une apparition exceptionnelle dans le film d’animation Ralph 2.0 en 2018, où elles aident la petite Vanellope von Schweetz à trouver l’héroïne qui est en elle.

roi agnarr la reine des neiges II

C’est en partant de ce postulat que l’équipe créative du premier film à qui tout a souri, développe ces nouvelles aventures. Le réalisateur Chris Buck a réalisé le classique d’animation Disney de 1999 Tarzan (avec Kevin Lima) et le film de 2007 Les Rois de la Glisse chez Sony Pictures Animation (avec Ash Brannon). Ayant débuté sa carrière comme simple animateur sur Rox et Rouky, a aussi travaillé sur La Petite Sirène en 1989, Bernard et Bianca au Pays des Kangourous en 1990 et Pocahontas, Une Légende Indienne en 1995. La réalisatrice et scénariste Jennifer Lee est l’une des scénaristes de la comédie d’aventures Les Mondes de Ralph.  La qualité de son écriture est soulignée chez Disney si bien qu’elle co-signe également le scénario de Zootopie en 2016 et celui d’Un Raccourci dans le Temps en 2018. C’est durant cette même année qu’elle succède à John Lasseter au poste de directrice créative des Studios d’Animation Walt Disney, fonction qui lui affuble naturellement le rôle de productrice exécutive de tous les projets à venir du label. Le duo Buck et Lee s’était réuni en 2015 pour La Reine des Neiges : Une Fête Givrée mais avait préféré laisser d’autres artistes travailler sur La Reine des Neiges : Joyeuses Fêtes avec Olaf en 2017, afin de mieux se pencher sur l’écriture et la réalisation de La Reine des Neiges II prévu en novembre 2019 au cinéma.

anna olaf arendelle

Nouveau défi

Ce deuxième opus réussit donc l’exploit inespéré d’épouser la magnifique recette du premier, en s’offrant le luxe d’entrer dans ses pas pour un succès non pas d’estime, comme c’est souvent le cas pour ce type de suite mais bel et bien sur la durée. C’est bien la première fois depuis peut-être Bernard et Bianca au Pays des Kangourous qu’une suite d’un Grand Classique Disney est aussi réussie. Certes, « le passé est passé » et les toutes les suites des films du studio produites en format « low-cost » durant les années 1990 et 2000 seront une tâche indélébile à l’image de marque du label mais cette nouvelle ère s’annonce prometteuse si toutes les suites sont aussi réussies. Dès lors, il n’est pas impossible de rêver d’une suite à Zootopie qui s’est également démarqué en 2016. Ralph 2.0 avait montré qu’il était tout à fait possible pour les studios de l’oncle Walt d’installer dans la durée ses dernières franchises. La Reine des Neiges II le confirme à point nommé.

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Mieux, il pousse un peu plus loin certaines thématiques tout en offrant un spectacle encore plus merveilleux emprunt de magie. Le scénario de La Reine des Neiges II révèle aux premiers abords des contours somme toute très classiques mais c’est là qu’il ne faut pas s’y tromper : le récit toujours aussi épique essentiellement, propose au fur et à mesure une construction plus poussée et entend s’imbriquer dans celui du premier film en approfondissant certains axes narratifs, notamment de l’enfance passée de Anna et Elsa, de leur cadre de vie tout comme de leur destin. Le film peut se targuer d’aller encore plus loin en répondant non seulement à de nouvelles questions qui s’installent durant deux heures mais aussi à percer certains mystères non résolus du premier. C’est là qu’il faut saluer sa prouesse scénaristique car si les minutes introductives paraissent assez précipitées avec un rythme légèrement abrupte, c’est pour mieux plonger nos protagonistes principaux au cœur de cette nouvelle histoire. Ainsi, l’écueil prévisible d’une installation en longueur est vite balayé, surtout avec l’aura de cet univers déjà bien connu de tout un chacun au départ.

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Et si le film de 2013 prenait de nombreuses libertés scénaristiques en terme d’adaptation du conte original de Hans Christian Andersen publié en 1845, le second volet s’en émancipe totalement. L’univers créé en 2013 peut effectivement se suffire à lui-même. Le premier film reprend des éléments clefs du livre. Le conte original raconte une lutte entre le Bien et le Mal. Dans le récit d’Andersen, un petit garçon prénommé Kai voit le monde en noir après avoir reçu des éclats de miroir magique dans l’œil et le cœur. Enlevé par la Reine des Neiges, il est bientôt recherché par son amie Gerda qui part à sa recherche dans les terres glacées du Grand Nord. L’intérêt que portent les studios Disney à La Reine des Neiges remonte… à Walt Disney lui-même ! Cependant, jamais il ne réussit à adapter le conte de manière satisfaisante, et le projet fut abandonné. Lorsqu’une nouvelle génération d’artistes reprit le projet, leur idée était bien sûr de capter les sentiments et les thèmes de l’histoire originale, mais d’apporter aussi l’esprit des classiques Disney tels que La Petite Sirène, un autre conte d’Andersen adapté au cinéma en 1989, permettant ainsi aux cinéastes de conserver une certaine liberté dans leur création. Ainsi, le personnage de la Reine des Neiges est devenu plus actuel et intemporel dans un cadre plus moderne. De cette histoire sont nés des thèmes récurrents comme la famille, l’amour ou la peur.

La Reine des Neiges II est une histoire aboutie

Comme pour les premières aventures d’Anna et Elsa, le récit du second chapitre mêle scènes d’action de haute volée, moments de grande émotion, notamment grâce aux passages chantés, véritables scènes d’autodérision et tableaux spectaculaires comme il en a rarement été offert jusque là par Disney. Ce savant mélange continue de fonctionner ici alors qu’on était en droit de s’attendre à une simple resucée. Non, c’est là le talent de Jennifer Lee à l’écriture, tout est habilement dosé et permet à l’histoire de progresser. Rien n’est laissé au hasard, pas même les scènes gaguesques plus hilarantes encore que dans le premier opus. Ainsi, on reprend le fil des aventures de la reine Elsa, de la princesse Anna, du vaillant Kristoff, du bonhomme de neige Olaf et du renne Sven avec un enthousiasme intact depuis 2013. La magie opère puisqu’on a plaisir dès les premières minutes à retrouver ce formidable quintette, qui par leurs émotions authentiques et la sincérité de leur affection commune, qui nous parlent au plus profond de nous, comme pourraient l’être des membres de notre propre famille. Tout est si naturel et c’est la force de cette saga assurément !

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L’originalité de cette suite – Jennifer Lee l’a encore bien compris en évitant un autre écueil – est de proposer un dénouement plus inattendu que jamais. Rien ne laisse présager de la fin des aventures de Anna et Elsa dans cette fameuse forêt enchantée. C’est justement à travers un registre du film d’aventure que l’histoire fait sens. Si ce genre, longtemps utilisé durant la Renaissance des studios Disney dans les années 1980 et 1990, avait été survolé en 2013 quand Anna et Kristoff partaient à la recherche de Elsa perchée sur sa montagne du Nord, là il est sublimé. Nos héros sont confrontés successivement à plusieurs défis haletants : chacun d’entre eux fait preuve d’audace et de bravoure et a droit d’ailleurs à son moment épique ; il n’y a pas de place pour la demi-mesure. Tout cela mène à la résolution d’une histoire plus complexe qu’il n’y paraît donc et les effets de surprise sont garantis (au pluriel). Au-delà de l’action, la magie surabonde et reste le cœur essentiel de la saga. Plus que jamais, Arendelle et la Norvège en offrent plein les mirettes. C’est toute une mythologie explorée dans le premier film qui est encore davantage développée ici. Tout paraît même cohérent dans l’érection de ce monde qui émerveille comme il donne le tournis.

into the unknown elsa

En effet, la magie est traitée de façon plus brute et proche des éléments naturels. Sa force et son imprévisibilité si on la manipule d’une façon ou d’une autre sont mis en exergue, dépassant largement les prouesses d’Elsa. Ici, la magie a plusieurs visages et un peu comme la Force dans Star Wars, est présente partout. Au début du film, il y a un « flashback » où le roi Agnarr, le père d’Anna et Elsa raconte une histoire à ses filles dans laquelle il leur parle du jour où, alors qu’il n’était encore qu’un enfant il s’est rendu dans la forêt enchantée. Cette forêt était habitée par des esprits magiques de la nature – air, feu, eau et terre – et même si ces esprits peuvent être enchanteurs, ils peuvent aussi être dangereux. Lors de sa visite, quelque chose a très mal tourné et a enragé les esprits, et Agnarr a des séquelles. Et bien qu’il ne sache pas qui l’a sauvé, il sait qu’une voix envoûtante a crié et qu’un brouillard magique a enveloppé la forêt et a poussé tout le monde à l’extérieur. Agnarr prévient ses filles que cette forêt peut se réveiller à nouveau et qu’elles doivent être prêtes lorsque ce jour arrivera. La magie n’est pas là où on l’attend et prend des formes surprenantes.

 

Plus givré !

Par ailleurs, l’humour, marque indélébile de cet univers, atteint des sommets dramaturgiques rarement égalés chez Disney. Car si en 2013, les personnages se contentaient d’offrir des répliques bien senties ou du comique de situation, ici, il est même question d’autodérision et de moments à pleurer de rire. Olaf et Sven restent sans aucun doute les premiers passeurs du genre mais, et c’est encore là toute la singularité de La Reine des Neiges II, ils ont davantage droit à des scènes plus profondes. Si Anna et Elsa sont moins impliquées dans ces scènes drôles, ça n’est clairement pas le cas de Kristoff, qui réussit à nous toucher dans des mises en scène plus risibles qu’autre chose. C’est là tout son charme. Enfin, l’histoire propose des pans encore plus sombres que dans les premières aventures des personnages. Des thèmes comme la perte de l’autre au sens propre comme figuré du terme, le non manichéisme, le rejet et l’indifférence de certaines communautés permettent à l’évidence de creuser l’intrigue et de questionner le spectateur. Plus mature que le premier volet et peut-être un peu moins angélique, le film raisonne et déraisonne dans une philosophie morale qui interpelle avec notre monde contemporain.

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La Reine des Neiges II sait émouvoir, probablement d’une manière différente que dans le premier film, mais les larmes couleront facilement ici et là si le spectateur se laisse emporter dans ce flot de moments parfois attendrissants, parfois simplement tristes. L’amour (familial) atteint encore une fois le sommet du podium des émotions véhiculées. Le lien qui unit les deux sœurs Anna et Elsa est exploré à nouveau dans des dimensions psychologiques plus en relief, voire même, pourrait-on dire certaines fois torturées. Leur affection si sincère et forte est ainsi proportionnel à la lutte qu’elles proposent ensemble pour affronter leurs nouvelles missions et faire face à leurs destins liés. Le couple formé par Anna et Kristoff n’est pas laissé-pour-compte dans l’intrigue qui lui permet d’évoluer et de s’épanouir de la manière la plus humaine qui soit. Tous les enjeux du film sont terriblement saisissants parce qu’ils jouent justement avec les émotions des héros : c’est vivant, naturel et touchant.

Après la neige, les feuilles

Si La Reine des Neiges, premier du nom s’était distingué par une technique d’animation à la pointe tant pour ses personnages que ses décors, depuis les Studios d’Animation Walt Disney, ont démontré qu’ils avaient encore beaucoup de talent à revendre pour sublimer l’art de la tridimensionnalité. Qui de Disney ou Pixar surpasse le genre ? Il est assez difficile de trancher car Toy Story 4 sorti également en 2019 avait placé la barre du réalisme encore un peu plus haut. Mais ici, il est question d’abord et avant tout de grand spectacle. Ainsi, les scènes d’action se voient plus intensifiées que jamais qu’il s’agisse de course-poursuites, de scènes aquatiques, de combats contre des humains ou les éléments ou simplement de véritables dépassements de soi. Le réalisme exacerbé des décors dont la beauté visuelle dépasse largement ceux du premier film apporte une dimension encore plus épique à chacune de ces scènes. Et les animateurs ne se contentent pas de ce simple effort : la Norvège qui inspire cet univers est une nouvelle fois le théâtre des opérations dans La Reine des Neiges II. Les magnifiques paysages du premier film ont ainsi été revus et améliorés visuellement. Les nouveaux sont également à tomber par terre. Le travail de dégradés et de colorimétrie comme celui des motifs présentés sont les éléments qui participent de ce spectacle magique tout le long. Dans le premier film, les animateurs se sont concentrés sur une palette de joyaux d’hiver qui fonctionnait à merveille avec la neige. Dans cette suite, ils traitent de l’automne et de la palette de couleurs d’automne, qui inclut du jaune au rouge foncé et au marron, et tout cela est du côté chaud. Ainsi, pour rapprocher les deux sensibilités, ils se sont davantage tournés vers des couleurs magentas et les rouges avec un laçage de jaune, au lieu de se focaliser sur la couleur orange. Ces teintes se retrouvent d’ailleurs sur les tenues magnifiques que porte Anna.

montagne du nord la reine des neiges II

Le travail sur cette séquelle a démarré lorsque l’équipe du film a effectué un voyage de recherche en Norvège, en Finlande et en Islande en 2016 ; chacun des membres a été profondément inspiré par la beauté des lieux. Les couleurs automnales de la Norvège, les cascades et la beauté époustouflante de l’Islande font partie du produit final. Le contraste entre la Norvège et l’Islande a aidé les cinéastes à définir les différences entre Anna et Elsa. Anna se sent chez elle en Norvège avec son décor de conte de fées, tandis qu’Elsa se plaît davantage dans une atmosphère sombre et mythique comme le présente l’Islande. Mais la civilisation humaine de Norvège et d’autres cultures scandinaves ont été reléguées au second plan et c’est bel et bien la beauté de la Nature de ces régions qui est mise à l’honneur. Si Disney a très souvent habitué son public à trop personnifier cette Nature (sauf peut-être dans Pocahontas, Une Légende Indienne ou Tarzan), il est question ici de lui offrir une place centrale, dénuée de toutes convenances fantaisistes (ou presque) qui brouillerait le propos des créateurs du film. En effet, cette même Nature tient non plus une place de simple environnement mais un rôle à part entière. Inutile d’envisager l’histoire du film sans en comprendre les tenants et les aboutissants qui ont attraits à un message écologique bien plus subtil que dans d’autres productions de la maison de Mickey. La magie qui émane des écosystèmes est fragile et docile à la fois, l’Homme n’est pas son bourreau mais au contraire fait partie d’un tout, et peut, dès lors l’exploiter, la restreindre pour son confort ou au contraire communier avec elle. C’est l’un des messages forts qui est relaté et Anna, Elsa, Kristoff, Olaf et Sven sont plus que jamais liés à ce sujet inédit.

La petite nouveauté à souligner est sans aucun doute l’originalité du montage et des plans, plus travaillés et perfectionnés dans ce second opus et adaptés à la cadence de l’histoire. L’animation des personnages ne progresse pas tant que ça quant à elle et reste assez fidèle au rendu de 2013. Ainsi, les émotions sur les visages des personnages sont saisissantes notamment au niveau des micro-expressions traduisant leurs pensées sur leurs visages et le public est happé tout le long. A ceci près que le personnage d’Elsa est un poil plus travaillée que les autres dans son design, notamment lors de ses scènes en solo, fluides, denses et fines. Toute l’étendue du potentiel technique des studios est alors condensé sur quelques minutes et il devient presque difficile pour l’œil averti de garder à l’esprit qu’il s’agit d’animation assistée par ordinateur.

elsa mer du nord

Des personnages toujours plus attachants

La Reine des Neiges II réussit le tour de force de prolonger l’attachement – voire de le renforcer – entre les fans et ses personnages aux identités psychologiques fines et pertinentes. Mais c’est aussi l’occasion de faire la rencontre de nouveaux visages qui ne sont pas que de simples prétextes au déroulé du récit.

Tout d’abord, Elsa, multiteintée de complexité, survole le film de par son rayonnement. Décrite à la fois plus humaine que jamais et prenant encore plus de hauteur sur les événements qu’elle affronte, la souveraine d’Arendelle garde la place d’élément central de cet univers, bien que le rôle d’héroïne à proprement parler revient plutôt à sa sœur. Après avoir vécu des moments de tourmente dans ses premières aventures, la voilà qui part en quête de réponses à des questions qu’elle se pose depuis toujours, la voilà également présenté comme une élue prête à protéger à la fois les siens et son peuple. Elsa est le personnage fantastique parfait car elle est magique et porte le poids du monde sur ses épaules. Les personnages mythiques rencontrent souvent un destin tragique, et c’est ce destin qui inquiète Anna et qui la pousse à protéger sa sœur. Dans le premier film, les mouvements d’Elsa étaient davantage basés sur le ballet alors qu’ici ses mouvements ressemblent davantage à une danse moderne. Ils équilibrent les respirations du personnage avec le mouvement de son corps, en transmettant l’émotion de chaque scène. Elsa a aussi de la grâce, et ses doigts bougent avec fluidité et souplesse quand elle lance de la magie, au lieu de prendre la forme d’une griffe. La voix originale de Elsa est toujours signée de la chanteuse et comédienne Idina Menzel qui a probablement et grandement participé au succès de ce personnage, tant dans ses prestations parlées que chantées. En France, des différends dans la collaboration entre des personnes travaillant pour Disney France et Anaïs Delva ont conduit cette dernière à ne pas reprendre le doublage de la voix française d’Elsa, qui a été confiée à Charlotte Hervieux. La performance de cette jeune comédienne qu’on a pu apercevoir dans certains spectacles de Disneyland Paris, n’a rien à envier à sa prédécesseur : le job est fait et avec brio.

elsa la reine des neiges II

Anna, est une nouvelle fois présentée comme l’antithèse même de Elsa. Et comme sa soeur, la princesse d’Arendelle connait des bouleversements existentiels non sans conséquences sur son destin. Elle aussi accomplit ses propres missions, elle aussi évolue au fil de cette nouvelle histoire. Toujours fidèle à ses principes et garante de la cohésion de sa famille, Anna est le personnage de conte de fées parfait, car c’est une héroïne ordinaire qui n’est pas « magique » et reste optimiste. Pragmatique et n’ayant jamais froid aux yeux, son rôle dans La Reine des Neiges II est plus que déterminant. Et comme dans le premier volet, Anna assume pleinement le rôle de soutien pour sa sœur : son affection fraternelle pour elle n’a pas d’égal. Enfin, elle prouve à plusieurs reprises que sa lucidité sur les événements dépasse largement celle de sa sœur. Kristen Bell, que les fans Disney connaissent bien pour être la voix officielle de la princesse au grand cœur, rempile dans ce film et apporte une nouvelle fois toute l’innocence, la détermination et la malice à ce personnage. En France, Emmylou Homs continue avec brio à prêter sa voix à l’héroïne.

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Encore plus attendrissant que dans le premier opus, Kristoff crève l’écran dans les scènes qui lui sont spécialement dédiées. Le premier héros masculin du film est beaucoup moins restreint dans ses agissements cette fois-ci et son évolution aussi simple que logique est une véritable respiration dans une histoire souvent très grave. Sa façon d’être, sa relation maladroite avec Anna et ses liens avec Sven en font un personnage des plus attachants. L’authenticité de ce faux bourru se révèle une fois encore à travers des moments tantôt héroïques, tantôt émouvants. Jonathan Groff pour la version originale et Donald Reignoux pour la version française offrent une interprétation truculente du personnage.

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Olaf, bonhomme de neige créé par la magie d’Elsa et devenu depuis membre à part entière de cette famille, rêve beaucoup moins de l’été et des gros câlins ici même s’il reste mignon à souhait. Son humour décape et chacun de ses gags fait mouche ! Les créateurs ont offert au personnage des situations plus rocambolesques les unes que les autres dans ce second volet, permettant à la fois de traiter avec autodérision du film, dont, rappelons-le encore une fois, les événements peuvent être graves et l’ambiance sombre. Il permet aussi d’apporter une touche de poésie supplémentaire quand nos héros se baladent dans la forêt enchantée. Après avoir endossé le rôle de Le Fou dans le remake de La Belle et la Bête, Josh Gad revient sous les traits de ce personnage toujours aussi drôlatique et charmant. Et en France, c’est toujours Dany Boon qui use de ses talents pour apporter une touche personnelle au bonhomme de neige.

Northuldra la reine des neiges II

La nature au coeur de la magie dans La Reine des Neiges II

Outre le retour de Sven qui a lui aussi droit à ses moments hilarants, La Reine des Neiges II traite de l’allégorie de la Nature magique avec une certaine subtilité et poésie. Bien qu’Elsa sache qu’Anna veut l’aider, elle sait qu’elle doit s’engager seule dans cette mission et sur cette voie de transformation. Lors de son voyage, elle fait face à la mer Noire, qui contient un esprit de l’eau majestueux et menaçant, appelé Nokk… Nokk provient de vieux mythes de la région nordique et de la culture scandinave. Il s’agit d’un cheval fait d’eau. La superbe de son animation mêlée à celle d’Elsa offre des scènes prodigieuses dans le film. Ses émotions nous sont transmises non pas avec son regard absent mais avec ses oreilles, ce qui est assez brillant.

nokk elsa la reine des neiges II

Le film présente également les Géants de Terre, qui sont faits de roche. Ils sont asymétriques, ce qui rend très difficile leurs déplacements et ils sont aussi très lourds. Leur réalisme tant dans leur matière que leur échelle est assez époustouflant par ailleurs, poussé à l’extrême puisqu’ils ne marchent pas mais les roches qui leur servent de membres inférieurs roulent sur eux-mêmes pour qu’ils puissent se déplacer. Autre élément, l’air. Le défi de créer Gale, l’esprit du vent, consistait à trouver comment mettre en scène le vent, une notion forcément abstraite à représenter dans un film d’animation. La solution a donc été de penser aux débris, aux bâtons, aux feuilles et à tout ce qui pourrait être dans la forêt et que les animateurs pourraient utiliser pour définir Gale. Au final, le public peur suivre cet être de scène en scène. Enfin, le personnage de Bruni est attrayant à souhait. Si la comparaison avec le personnage de Pascal du film Raiponce est toute trouvée visuellement, cela s’arrête là. Rien n’est comparable à ce personnage dans son comportement et ce qu’il représente. Adorable salamandre, Bruni est la valeur ajoutée cartoonesque du film.

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Du côté des nouveaux personnages humains, même s’ils étaient déjà présents dans le premier film, nous en savons un peu plus sur les parents de Anna et Elsa. Le Roi Agnarr est doublé par Alfred Molina (Les Aventuriers de l’Arche Perdue, Spider-Man 2 Ralph 2.0) et la Reine Iduna par Evan Rachel Wood (Westworld) en version originale et Prisca Demarez en version française. Sterling K. Brown tient quant à lui le rôle du lieutenant Mattias, un ancien soldat de l’armée d’Arendelle pris au piège dans la forêt enchantée depuis une bataille féroce menée il y a 30 ans, lorsque le grand-père d’Anna et d’Elsa était roi. Ce personnage est doublé en France par Baudouin Sama. Enfin, sans trop en dire, un nouveau peuple indigène est introduit dans ce film, les Northuldra. Bien que leur présence fait sens dans l’intrigue, ce sont sans doute les personnages les moins exploités du récit. A peine introduits, ils sont vite délaissés et n’ont finalement que peu d’intérêt dans le deuxième acte. Il n’empêche, trois figures s’en détachent : l’esprit libre d’Honeymaren (Rachel Matthews), l’esprit curieux Ryder (Jason Ritter), qui se trouve une passion commune avec Kristoff et la sage Yelana (Martha Plimpton), fidèle aux idéaux de son peuple qu’elle protège.

lieutenant matthias

La Reine des Neiges II : une nouvelle épopée musicale

Mais que serait La Reine des Neiges II sans son épopée musicale ? Proposer une suite au film de 2013 sans musique aurait été forcément vécu comme un blasphème. Les chansons et plus généralement la bande-originale participent de l’ambiance singulière, dans la tradition des classiques animés des années 1990. Le pari était osé : Kristen Anderson-Lopez et son mari et partenaire d’écriture Robert Lopez, qui ont depuis brillé avec un autre long-métrage d’animation, COCO, ont travaillé à nouveau main dans la main avec les réalisateurs pour concevoir les nouvelles chansons. Sont-elles à la hauteur de celles du précédent film dont une est devenue, pour le meilleur et pour le pire, l’un des hymnes les plus célèbres du répertoire Disney et plus largement de la pop-culture ? La réponse est oui.

reine iduna

Certes, beaucoup moins de chansons marquent dans ce second volet. La faute probablement à notre attachement aux premières chansons… Mais au moins deux d’entre elles marquent les esprits au point de les fredonner les jours suivants : des tubes sont là. Contrairement au premier film, La Reine des Neiges II propose moins de chansons mais elles sont en revanche mieux réparties. On en comptera en tout sept. Etant enfants, les jeunes Anna et Elsa sont préoccupées par le danger possible décrit par leur père dans son histoire ; c’est alors que leur mère leur chante une berceuse sur un lieu qui offre toutes les réponses à toutes les questions qu’elles se posent. La contine « La Berceuse d’Ahtohallan » (« All Is Found ») est la première chanson du film interprétée par Evan Rachel Wood et a un rôle important à jouer, d’un point de vue narratif tout au long du parcours d’Elsa. A la fois douce et lyrique, cette chanson apporte déjà des frissons aux spectateurs au début du film. Mais la vraie première chanson à rester en mémoire est assurément « Pas d’Avenir sans Nous » (« Some Things Never Change ») interprétée par Anna, Elsa, Olaf, Kristoff et les habitants d’Arendelle. Ce morceau collégial, mettant en avant la gaieté qui s’est installée à Arendell, est totalement réussi et constitue à lui seul « l’esprit La Reine des Neiges » : de la grande performance digne de Broadway au service d’une magie. Vient ensuite le nouveau solo de Elsa. La question légitime qui se pose dès lors est pourquoi avoir voulu lui offrir un second « Libérée, Délivrée » ? Cette question est discutable d’autant que le thème même de la chanson ne s’éloigne pas tant que ça de celle du premier. Dans « Dans un autre monde » (« Into the Unknown »), il est question de découverte de soi, de recherche d’identité personnelle, de quête d’avenir… Ce reproche étant fait, la chanson est celle qui, par son interprétation éminemment juste, ses images exceptionnelles et riches de sens et sa puissance, se démarque de tout le film. Grâce à cela, la chanson s’installe dans les partitions musicales du film pour en faire un outil de narration dans la quête d’Elsa. La volonté est telle que ses créateurs la placent comme une digne successeur à « Let it Go ». Elle sera sans mal adoptée par le public mais ne bénéficiera certainement pas du même impact sur les consciences au point d’en faire un standard qui dépasserait les frontières de Disney. Les trois autres chansons qui suivent sont plus légères. Olaf s’offre une nouvelle envolée, bien moins percutante et exceptionnelle que « En Eté » avec « Quand je serai plus grand » (« When I Am Older ») et qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe dans l’histoire. Kristoff a droit à deux chansons. Il reprend tout d’abord sa vieille ritournelle « Le Chant du Renne » (« Reindeer(s) Are Better Than People ») pour le grand plaisir des spectateurs mais c’est sa chanson inédite « J’ai perdu le nord » (« Lost in the Woods ») qui, unanimement, emporte l’adhésion du public. Sans trop en dire, l’ingéniosité des scénaristes et des compositeurs d’avoir offert cette musique à contre-emploi du personnage est à saluer et fait de cette scène peut-être l’une des plus marquantes tant pour mise en scène que les émotions qu’elle procure dans sa dramaturgie. Bien que « Je te cherche » (« Show Yourself ») interprétée par Elsa à la fin du film soit une totale réussite, elle sert plus le propos qu’elle s’émancipe comme chanson à part entière, probablement parce que sa musicalité tatonne entre mélodie et orchestration. En revanche, on soulignera le visuel impeccable qui l’accompagne, offrant des tableaux métaphoriques du plus bel effet. Enfin, la chanson la plus bouleversante revient à Anna, qui dans un solo brillant et brut, nous offre avec « Tout réparer » (« The Next Right Thing ») un moment de grâce à en donner des frissons et des larmes, dans un moment charnière de l’histoire. Enfin, les crédits du film proposent trois reprises musicales, à savoir « Into the Unknown » chantée par le groupe Panic! at the Disco, « All Is Found » par Kacey Musgraves et « Lost in the Woods » par Weezer.

musique la reine des neiges II

A côté de cela, le compositeur Christophe Beck rempile une seconde fois pour mettre en musique le reste de la bande-originale. Fidèle à ses inspirations puisées dans la culture norvégienne, le papa de la musique de la saga Ant-Man chez Marvel Studios, propose un travail toujours impeccable. La profondeur de son écriture, sa manière de traiter les psychologies des personnages et la réadaptation harmonieuse des anciens thèmes du premier opus participent de la réussite de sa nouvelle partition, épique et émouvante.

La Reine des Neiges II : la plus belle suite d’un Disney

Trois ans après les événements du premier film, l’histoire de La Reine des Neiges II est pleine de rebondissements ; grâce à ses musiques enivrantes, ses personnages toujours plus attachants et sa magie folle, elle nous emporte du début à la fin dans une expérience rare et offre aux Studios d’Animation Walt Disney la meilleure suite de leur existence. Le film décuple à peu près tout (voire fait mieux) par rapport au premier, qui était déjà en soi un pur bijou. Véritable conte de fées mythique sur la famille, la découverte de soi, le courage et le pouvoir de ne jamais abandonner, il élargit un univers toujours plus attrayant et construit dans la déconstruction des axes narratifs et des mystères. Il va sans dire que cette épopée mystique, musicale et émouvante pose plusieurs questions (les origines des pouvoirs de Elsa, leur ascendance, les menaces qui pèsent sur Arendelle), tentent d’y répondre mais pas forcément de la manière qu’on l’imagine et c’est tant mieux car presque ou peu de choses sont prévisibles dans cette histoire. On en ressort également avec d’autres questions en tête car le film a ce pouvoir d’éveiller la réflexion du spectateur sur l’après sans pour autant tomber dans la facilité d’un « cliffhanger » qui aurait nui au ressenti final.

grand pa elsa anna

L’accueil triomphal réservé au premier volet est sur le point de se renouveler avec ce nouveau chapitre, qui rencontrera un triple succès, celui d’être la suite du film aux 1000 éloges de 2013, celui d’être le film parfait de Noël et celui de constituer une superbe histoire époustouflante qui émerveillera petits et grands. La Reine des Neiges II est en passe de réaliser de nouveaux exploits au cinéma et d’achever avec Star Wars : L’Ascension de Skywalker, probablement l’année au box-office la plus exceptionnelle qu’ait connu la firme aux grandes oreilles depuis sa création. Elle conforte également la place de nouvelle leader créative de Jennifer Lee à la tête du studio fondé par Walt, plus épanoui que jamais.

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